Pardonner pour soi

pardon, pardonner, to forgive, forgivenessIl y a de la force dans le fait de pardonner. Je vous assure. Cela n’en a peut-être pas l’air comme ça et je vous avoue avoir longuement médité sur ce que je gagnerai à pardonner, mais je le redis, il y a de la force et de la puissance dans le pardon.

J’ai dû le découvrir à mes dépens. Grâce à une année 2015 riche en montagnes russes émotionnelles, pleine de va et vient relationnels, de déceptions, d’envie de couper les ponts et d’oublier, de tout oublier de tout simplement m’extraire de cette folie et punir l’autre par mon absence, mon abandon, mon renoncement à cette relation à laquelle je ne pouvais, en définitive, difficilement renoncer.

pardonner pour y voir plus clair 

Pardonner nous demande de faire le double effort de prendre du recul sur la situation et d’être assez lucide sur soi pour s’analyser. Cela requiert de se mettre en retrait pour « digérer » de manière émotionnelle et intellectuelle l’évènement à la base de l’offense. Cela nous demande d’être assez fort pour analyser les choses, l’autre et ses torts ainsi que nous : nos actions, nos manques d’actions et de défense, nos mots, nos actes, nos ripostes. Pardonner nous demande de prendre le temps de regarder les choses en face pour voir ce qu’il reste de cette relation, ce qu’il reste de nous, de ce que l’on plaquait sur ce lien et de ce qu’il en est vraiment.

Viens alors le temps de l’acceptation ou pas.

accepter

Je suis passée par là. Ce fut un long chemin tortueux. Fait de moment de maîtrise et de raisonnement logiques et raisonnables, suivis de moments de rages et d’envie de punir, de faire mal, de faire ressentir à l’autre la profondeur de ma blessure. Je suis passée par toutes les palettes des sentiments attachées à la douleur.

Et j’avais besoin de cela.

Je n’ai pas essayé de me raisonner ni de remettre en cause ce que je ressentais. Juste de le vivre, le ressentir, le laisser s’exprimer afin de m’exprimer et d’exorciser par la même occasion le mal. Si la colère était la composante de mon mood du jour eh bien soit. Quand la peine et la nostalgie faisaient leur entrée je les accueillaient également. J’ai laissé chaque émotion prendre sa place, exhaler son essence puis s’affadir avec le temps. Je voulais à travers elles me respecter et me laisser le temps.

Nos émotions sont bien souvent plus saines et « logiques » que nous avons tendance à le croire. Elles nous donnent une indication précise sur notre état profond et sur notre sensibilité aux interactions extérieures. À trop vouloir refouler ma colère, à trop vouloir repousser mon indignation j’ai laissé l’élan d’autrui prendre le pas sur moi sans prendre en compte mon ressentis, ce garde-fou intime qui à plusieurs reprises m’indiquait que là, la limite avait été franchie.

J’ai expérimenté tout cela jusqu’à un jour décider de pardonner.

avancer

Le calcul a été simple : je voulais par dessus-tout avancer, je voulais me redéfinir par rapport à cette situation non plus comme la victime de la maladresse de l’autre mais comme l’allié responsable de mon bien être psychologique et émotionnel. Comment pouvais-je y arriver ? En décidant de pardonner.

Cela fut dur. Dans ce processus, j’ai longtemps eu la sensation qu’il y avait quelque chose de l’ordre d’une bataille perdue que je m’infligeais, comme si je laissais l’autre avoir l’avantage sur moi une seconde fois en lui accordant mon sacro-saint pardon. J’avais la sensation que pardonner annihilait ou invalidait ma souffrance. La réalité est que j’acceptais de m’enfermer davantage dans un schéma de personne blessée en refusant de me revêtir de ce pouvoir terrible contenu dans le fait d’absoudre l’autre du tort qu’il nous a infligé. Pardonner c’est retirer la « puissance » ou l’emprise que l’assaillant a eu sur vous pour le reprendre. C’est un acte libérateur qui libère l’autre de sa posture de « méchant » et bien plus encore de notre situation de victime.

Réfléchis-on y. En remettant l’autre de sa faute, on l’en décharge littéralement. Il n’est donc plus coupable et s’il n’est plus coupable nous ne sommes plus, par définition, des victimes de leur acte injuste. C’est un rééquilibrage de la situation qui nous permet d’aller de l’avant. De libérer l’autre POUR se libérer et avancer.

De cette longue introspection sont ressortis quelques règles de vie :

  • ne pas nier ce que l’on ressent : jamais. Nier ne revient qu’à repousser à plus tard le moment où il faudra faire face à ces sentiments. Le temps aidant, l’amertume nous rongeant davantage jours après jours, fort es à espérer que votre ressentis soit décuplé et s’expriment de manière bien plus violente et disproportionnée que naturellement.
  • ne pas essayer d’aller plus vite en occultant des étapes : se dire qu’en faisant l’impasse de l’expérimentation de la douleur, de la déception et du deuil pourra vous faire gagner du temps et arrondir les angles avec autrui est une illusion. Ne pas aller trop vite est une manière de respecter le cours naturel des choses, le processus naturel de réparation et de reconstruction. La qualité de votre développement personnel et de la réparation de ladite relation (si elle est encore à l’ordre du jour) dépend du respect de chacune des étapes. Attention aux effets boomerang dû a des simili-pardons dont les conséquences sont souvent l’explosion sous la pression et les faux semblants. Vous ne tromperez personne, pas même vous.
  • être lucide à propose de l’autre, la teneur de la relation et prendre des décisions : décider de pardonner oblige à se mettre dans une posture de bilan et d’analyse. Ces derniers effectués, libre à vous de décider de poursuivre ou pas cette relation malgré l’acte de pardon.
  • pardonner pour soi, pour sortir de schémas, sortir de l’état de victime pour embrasser celui de responsable de son équilibre et de son bonheur. Le pardon n’a rien à avoir avec le fait de bien faire, ou d’obéir à une logique de manière bête et méchante, pardonner est un acte volontaire de libération des deux parties en cause

  • pardonner pour ne pas altérer ce que nous sommes : je me suis sentie changée par cet évènement. La peine m’avait tellement transformé intérieurement et altéré ma disponibilité à la joie et à la paix que je me suis dit que je me le devais. Si je ne décidais pas de pardonner, le venin inoculé continuerait ses effets destructeurs en moi.
  • laisser du temps au temps : du temps à soi, du temps à l’autre, du temps pour guérir, du temps pour réfléchir à ce que nous valons vraiment et à ce que nous ne sommes plus en mesure d’accepter, le temps de se pardonner.
  • et s’il reste de l’espoir, pardonner pour donner une seconde chance à la relation ?

À toutes celles et ceux qui sont sur le point de pardonner ou qui se demande si sauter le pas en vaut le coup, je vous dis oui, mais pas parce que c’est bien, pas pour l’autre mais par ce que vous en avez besoin pour avancer, pour vous libérer, pour vivre, rêver et aimer encore.

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crédit image : Anna Howard

2 Small Talks sur Pardonner pour soi

  1. Bonan Martine
    24 mars 2016 at 16 h 07 min (8 années ago)

    Magnifique ma Sarah et je confirme tout ton écrit…tu connais mon histoire, et sans cette force à pardonner, malgré la douleur…la tristesse…le désarroi…le mal…etc… Nous restons dans un statut quo…de non retour à nos sentiments figés par la blessure. Oui le pardon nous libères de ses chaînes, et laisse place à une légèreté d’esprit, d’un poids qui nous oppressait…le pardon restaure, une relation meilleure et surtout à une nouvelle porte qui s’ouvre à l’amour, l’harmonie, la joie et surtout à une PAIX INTERIEUR…

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    • Sarah
      25 mars 2016 at 10 h 13 min (8 années ago)

      Coucou Martine, un grand merci pour ton retour. ça fait du bien de lire que l’on est pas seule à se poser ce genre de question. Je peux témoigner à ce que je vois de toi aujourd’hui combien cela t’a libéré ! Grosses bises et bonne journée !

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